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IF YOU WAIT, IT WON'T BE UNDONE

Si on maintient les cordes d'un piano pendant que l'on joue ses touches, on entend le départ d'une note presque sourde, l'écho lointain de la mémoire qui se fissure....


i,i de Bon Iver



 

i,i est une guérison courageuse dépourvue de stabilité. Elle n’en cherche pas. Elle est la somme des directions qui se reforment après le trouble, et c’est la vulnérabilité qui les redessine. Tout ce que l’on doit recevoir et accepter pour avancer. Tout ce que l’on doit répéter pour regarder différemment.

Si la première lecture de l’album nous dirige vers un questionnement sur le futur qui nous attend, la conclusion de chaque titre, la même pour tous, nous propose quant à elle une solution paradoxale : peut-être que rien ne compte et peut-être que tout compte à la fois. Mais il faut vivre chacune de ces possibilités en abandonnant l’inquiétude.

L’importance de l’expérimentation du son chez le groupe consomme ici la mue déjà amorcée lors des précédents albums. Elle réverbère la profondeur des émotions, elle les laisse se déformer et errer librement. La forme, tour à tour construite puis déconstruite nous engage profondément dans la fabrication. Nous sommes là, pendant la création avec "Yi". Nous sommes là, au dépôt de la dernière brique qui assemblera l’histoire et le chemin de l’œuvre aux échos de "RABi".

Ce privilège d’implication rend l’écoute précieuse et délicate. Pour bien la comprendre, il faut traverser l’émotion sans jugement et accueillir ses essais, ses finalités et non-finalités qui font battre plusieurs coeurs à la fois, celui du désespoir et celui du reflet qui se rassure.


i,i n’est pas une réflexion solitaire puisqu’il offre plusieurs voix à ses tourments en invitant d’autres artistes à les chanter (Moses Sumney, Jenn Wasner, Elsa Jensen…) qui permettent d’aérer l’immersion, élargir l’expérience. Souvent, les choeurs répètent ce que l’on ne doit pas manquer (« I can hear crying ») comme un cri puis comme un secret, pour soutenir l’impact et foncer droit à l'intérieur. C’est cette humanité résistante qui tient l’oeuvre en la soulageant de ses angoisses. Mais ce qui donne à l’album son éclat confiant, c’est ce son lointain, aiguisé, pourtant si familier qui ouvre l’espace en rattachant la lumière à une note qui vient nous étreindre. Aux derniers instants de RABi, l’onde se propage alors, elle se décomplexifie pour envoyer un sentiment d’apaisement, une fenêtre sur l'équilibre. « If you wait It won’t be undone… » peut-être pouvons-nous commencer par résoudre les conflits en se libérant de leur poids.


© Aaron Anderson and Eric Timothy Carlso


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